Actualités de l'assurance en France : réglementation et jurisprudence

  • Développement en droit 11 avril 2023 11 avril 2023
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Sommaire

1. Regulations and recommendations

2. Jurisprudence

 

1. Réglementation et recommandations

1.1 Promulgation de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat (loi n°2022-1158 du 16 août 2022)
 

La loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a été promulguée le 16 août 2022 et publiée au Journal officiel le 18 août 2022.

Le texte, qui a notamment pour objet de protéger les consommateurs, comprend un volet impactant l’assurance. Deux points à retenir :

  • Faculté de résiliation en ligne du contrat d’assurance souscrit par voie électronique ou non (ajout d’un paragraphe à l’article L. 113-14 du Code des assurances). 
    • Les assureurs devront prévoir, au plus tard au 1er juin 2023, un « bouton résiliation » en ligne facile d’accès. A noter que ces nouvelles dispositions s'appliquent également aux contrats en cours à la même date. 
    • Un décret du 16 mars 2023 (décret n°2023-182) est venu préciser les modalités d’accès et d’utilisation de la fonctionnalité de résiliation et de dénonciation par voie électronique.
  • Le délai de renonciation d’un contrat d’assurance affinitaire passe de 14 jours à 30 jours à compter de sa souscription et sans condition de justification d’une garantie antérieure pour l’un des risques couverts par le nouveau contrat (modification de l’article L. 112-10 et de l’annexe de l’article A. 112-1 du Code des assurances au 1er janvier 2023).

1.2 Encadrement du démarchage téléphonique des produits d'assurance

1.2.1 La loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux a instauré un certain nombre d’exigences à la charge des professionnels y compris ceux du secteur de l’assurance (loi n°2020-901 du 24 juillet 2020)

Parmi ces obligations, figure l’obligation de respecter les jours, les horaires et la fréquence auxquels le démarchage téléphonique est possible.

1.2.2 Un décret fixe ces jours, horaires et la fréquence (décret n°2022-1313 du 13 octobre 2022 – entrée en vigueur des dispositions le 1er mars 2023

  • Le texte autorise les appels du lundi au vendredi, de 10 h à 13 h et de 14 h à 20 h. En revanche, ils sont interdits les samedis, dimanches et jours fériés.
  • Limitation du nombre de sollicitations : 
    • Un client potentiel ne peut être contacté à des fins de prospection commerciale « plus de quatre fois par mois par le même professionnel ou par une personne agissant pour son compte ». 
    • De même, si le consommateur refuse d'être contacté au cours de la conversation, le « professionnel s'abstient de le contacter ou de tenter de le contacter avant l'expiration d'un délai de soixante jours calendaires à compter de la date de ce refus ».
  • Cet encadrement s’appliquera aussi bien aux personnes non inscrites sur la liste Bloctel qu’à celles inscrites mais sollicitées dans le cadre d’un contrat en cours. Toutefois, il ne s’appliquera pas si le consommateur a donné son consentement exprès et préalable pour être appelé, le professionnel devant en justifier. 
  • En cas de non-respect, les professionnels concernés sont passibles d'une amende administrative de 75 000 euros pour une personne physique et de 375 000 euros pour une personne morale.

1.2.3 L’ACPR met en demeure un courtier après avoir relevé plusieurs manquements (communiqué de presse de l’ACPR, 22 décembre 2022)

  • Le premier manquement relevé porte sur la commercialisation d’un produit d’assurance sans le concours d’un assureur dûment agréé. 

  • Les autres manquements portent sur le dispositif mis en place pour la commercialisation d’un produit d’assurance par voie de démarchage téléphonique en matière d’information contractuelle. Les manquements concernent :

    • Le contenu des informations communiquées au client lors de l’appel de vente, les modalités de remise des documents et les délais laissés pour en prendre connaissance avant la souscription. 

    • Le recueil des exigences et des besoins du clients et l’adéquation du conseil délivré. 

1.2.4  Décision de la DGCCRF relative au démarchage téléphonique (DGCCRF, 17 janvier 2023)

  • Le 17 janvier 2023, la DGCCRF a prononcé une sanction administrative de 8 790 euros à l’encontre d’un courtier d’assurance pour des manquements aux règles du démarchage téléphonique.
  • La DGCCRF reproche au courtier d’assurance d’avoir démarché téléphoniquement 879 consommateurs inscrits sur la liste Bloctel, en violation de l’article L. 223-1 du Code de consommation. 

1.3 Recommandation de l’ACPR concernant le traitement des réclamations (recommandation de l’ACPR 2022-R-01 du 9 mai 2022)

  • La recommandation de l’ACPR 2022-R-01 du 9 mai 2022 sur le traitement des réclamations est applicable depuis le 31 décembre 2022 (mise à jour de l’ancienne recommandation n°2016-R-02 du 14 novembre 2016 modifiée le 6 décembre 2019).
  • Par rapport à l’ancienne recommandation, la nouvelle recommandation comporte les innovations décrites ci-après :
    • Si elle définit toujours la réclamation comme l’expression d’un mécontentement envers un professionnel, elle précise que celle-ci peut émaner de toute personne, y compris en l’absence de relation contractualisée avec le professionnel.
    • Le traitement des réclamations doit s’effectuer quel que soit leur canal d’expression, y compris à l’oral. 
    • Les délais de réponse doivent être cohérents avec l’objet du mécontentement exprimé, en particulier lorsque celui-ci porte sur un délai d’exécution. 
    • La réponse apportée doit mentionner le médiateur susceptible d’être sollicité et les modalités pratiques de sa saisine. 
    • Comme par le passé, les professionnels doivent identifier, au travers des réclamations et des demandes de médiation, les dysfonctionnements et autres, afin de prendre des mesures correctives pour y remédier. 
    • Mais ils doivent également analyser la qualité du dispositif de traitement des réclamations et, chaque année au moins, soumettre aux instances de gouvernance un rapport sur la qualité du dispositif mis en place, les dysfonctionnements constatés et les mesures correctives envisagées ou mises en œuvre.
       

1.4 Assurance affinitaire (avis du Comité consultatif du secteur financier du 17 janvier 2023)

  • Le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a adopté un avis qui porte sur les contrats d’assurance affinitaire proposés en option au client qui souscrit un contrat à des fins non professionnelles, lors de l’achat d’un bien ou d’un service (assurance voyage, assurance de produits nomades et assurance extension de garantie des produits de consommation courante), à l’exclusion des contrats à durée ferme qui comportent une prime unique.
  • Les quatre recommandations portent sur de bonnes pratiques :
    • Sur le recueil du consentement. Par exemple, après la signature du contrat d’assurance, une lettre de bienvenue est remise à l’assuré dans les meilleurs délais sur support papier ou par courriel. L’avis précise les mentions que doivent comporter cette lettre de bienvenue. 
    • Sur l’envoi chaque année d’une information complète à l’assuré qui est fournie sur support durable (si l’information annuelle est remise dans l’espace client, l’assuré en est averti par courrier, courriel ou SMS). L’avis précise les mentions que doivent comporter cette information annuelle. 
    • Sur le renforcement de l’information pour les contrats visant une extension de garantie d’un produit ou d’un service. Par exemple, le distributeur doit préciser au consommateur qu’il s’agit d’un contrat d’assurance et non d’une garantie légale ou commerciale. L’assureur, eu égard au décalage de plusieurs années de son activation, devra adresser un rappel au consommateur 2 mois avant la prise d’effet de la garantie. 
    • Sur la distribution des contrats d’assurance affinitaire. Il est rappelé que le mode de rémunération lié aux ventes des contrats d’assurance affinitaire répond effectivement aux exigences de la réglementation, notamment en matière de prévention des conflits d’intérêt. 

1.5 Catastrophes naturelles

1.5.1 Ordonnance relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols (ordonnance n°2023-78 du 8 février 2023)

  • Le 8 février dernier, le ministre de l’Économie a présenté en Conseil des ministres une ordonnance relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols.
  • Cette ordonnance a pour objectif d’augmenter le nombre de communes éligibles à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et d’améliorer la prise en compte du caractère lent et progressif du phénomène de sécheresse-réhydratation des sols dans le cadre du régime des catastrophes naturelles. 
  • L’ordonnance opère un ajout parmi les dommages pouvant être considérés comme des effets des catastrophes naturelles et précise les conditions d’indemnisations des sinistres résultant de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols. 
  • Une nouvelle obligation est prévue concernant l’affectation de l’indemnité perçue au titre d’un sinistre causé par le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols. Désormais, les sinistrés doivent utiliser l’indemnité pour réaliser des travaux de réparation durable de leur habitation pour éviter les conséquences d’éventuels mouvements de terrain futurs. 
  • Le texte fixe également des règles spécifiques d'encadrement de l'expertise d'assurance en matière de sécheresse et de réhydratation des sols et définit un régime de contrôles et de sanctions des experts. 
  • L’ordonnance doit rentrer en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2024, sauf pour les dispositions relatives aux experts qui entreront en vigueur au plus tard le 1er janvier 2025. 

1.5.2  Catastrophes naturelles : deux textes du 30 décembre 2022 fixent les nouvelles modalités d’indemnisation

Le décret n°2022-1737 du 30 décembre 2022, complété par l’arrêté du 30 décembre 2022, précisait quatre axes d’amélioration du dispositif d’indemnisation des catastrophes naturelles : 

  • Les conditions de prise en charge des frais de relogement d’urgence. Cette garantie doit être incluse dans tout contrat d’assurance dommages à des biens d’habitation souscrit par tout occupant ayant la qualité d’assuré et dont l’habitation sinistrée est la résidence principale.
  • Il est mis fin à la modulation des franchises et le montant de la franchise est appliqué pour chaque contrat : une fois par véhicule terrestre à moteur, une fois par établissement professionnel, sur la totalité des dommages causés sur les biens couverts par un même contrat pour les autres biens ou par risque pour les contrats couvrant plusieurs risques. 
  • Les exigences formelles et procédurales des décisions de reconnaissance ou de non-reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.
  • Les règles de composition, d’organisation et de fonctionnement de deux commissions, consultatives (la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles et la Commission interministérielle de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle). 

1.6 Cyber

1.6.1 Entrée de l’assurance des risques de cyberattaques dans le Code des assurances (loi n°2023-22, 24 janvier 2023, articles 5 et 29)

  • La loi insère dans le Code des assurances un chapitre consacré à l’assurance des risques de cyberattaques. La loi subordonne l’indemnisation par l’assureur au dépôt d’une plainte qui doit intervenir au plus tard dans les 72 heures de la connaissance de l’infraction.
  • Le nouvel article entrera en vigueur le 24 avril 2023, sa numérotation actuelle, L. 12-10-1, est inhabituelle (dans la version initiale du projet de loi la numérotation retenue était L. 129-2). 

1.6.2 Création de deux nouvelles catégories d’assurance pour le risque cyber (arrêté du 13 décembre 2022 relatif à la classification des engagements d’assurance consécutifs aux atteintes aux systèmes d’information et de communication)

  • Deux catégories d’opération dédiées au risque « cyber » dans le Code des assurances (article A. 344-2 du Code des assurances) ont été créés :
    • Catégorie 32. Dommages aux biens consécutifs aux atteintes aux systèmes d’information et de communication ; 
    • Catégorie 33. Pertes pécuniaires consécutives aux atteintes aux systèmes d’information et de communication. 
  • La création de ces catégories n’a d’impact que sur les comptes ouverts à compter du 1er janvier 2023. 

1.7 Intégration dans la loi de finance 2023 de dispositions concernant les captives de réassurance (loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finance pour 2023)

  • L'article 6 de la loi de finance pour 2023 concernant les captives vise à faciliter la constitution de captives de réassurance en France en créant une provision spécifique destinée à faire face aux charges, en franchise d’impôt.
  • Dans une décision du 29 décembre 2022, le Conseil constitutionnel a jugé ce dispositif de gestion interne des risques des entreprises conforme à la Constitution.

1.8 Sanction disciplinaire prononcée par l’ACPR à l’égard d’un courtier (décision de la commission des sanctions de l’ACPR, 17 octobre 2022, n°2021-04)

L’ACPR considère que « manquer gravement aux obligations en matière d’information et de conseil, c’est méconnaître totalement les exigences [de la] profession [d’intermédiaire en assurance] ».

Les griefs notifiés au courtier sont les suivants: 

  • Défaut de remise de l’information précontractuelle sur un support durable dans le cadre d’une vente à distance ;
  • Défaut de remise de l’information précontractuelle en temps utile avant la conclusion du contrat ;
  • Inexactitude et insuffisance des informations précontractuelles communiquées ;
  • Absence de respect des obligations au titre du devoir de conseil.

Par ailleurs, la responsabilité personnelle du gérant et de l’associé majoritaire est retenue et une sanction pécuniaire est prononcée à l’encontre du courtier, du gérant et de l’associé majoritaire assortie d’une interdiction de pratiquer l’activité d’intermédiaire en assurance pour une durée variant de 5 à 7 ans.  

1.9 Durabilité dans le secteur des services financiers (instruction de l’ACPR n°2022-I-24 du 14 décembre 2022)

L’ACPR précise dans son instruction du 14 décembre 2022 les modalités de diffusion des informations relatives aux engagements en matière de durabilité que les assureurs doivent porter à la connaissance de l’ACPR dans le cadre des exigences posées par le règlement UE 2019/2088 dit « SFDR ». 
 

2. Jurisprudence

2.1 Conditions de garantie, exclusions et déchéances

2.1.1 Conditions de garantie 

Cass. civ. 2ème, 15 décembre 2022 (pourvoi n°20-22.356) 
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation décide que les clauses d’un contrat d’assurance formulant des exigences générales et précises à la charge de l’assuré constituent des conditions de la garantie. Selon la Cour, il importe peu que la sanction du non-respect de ces conditions de la garantie ne fasse pas l’objet d’une mention expresse.

2.1.2  Exclusion de garantie – connaissance de la clause d’exclusion de garantie

Cass. civ. 2ème, 31 mars 2022 (pourvoi n°19-17.927) 
La Cour de cassation indique que l’assureur doit établir avoir porté à la connaissance de l’assuré la clause d’exclusion de garantie avant la réalisation du sinistre. Dans l’arrêt du 31 mars 2022, la Cour constate que cette condition n’est pas remplie par la simple transmission des conditions particulières à l’assuré dès lors que les conditions particulières n’étaient pas signées par l’assuré et renvoyaient, en termes généraux, aux conditions générales, elles-mêmes non signées.

2.1.3 Exclusion de garantie – caractère formel et limité de la clause d’exclusion de garantie

Cass. civ. 2ème, 31 mars 2022 (pourvoi n°19-24.847) 
La Cour de cassation considère qu’une clause d’exclusion de garantie visant les affections psychiques, sans autre précision que celle incluant les dépressions nerveuses n’est pas formelle et limitée. Par conséquent, la clause d’exclusion de garantie ne peut recevoir application, même si l’affection dont était atteint l’assuré était énumérée dans ladite clause.

Cass. civ. 2ème, 7 juillet 2022 (pourvoi n°21-14.288) 
Les clauses d’exclusion de garantie doivent, pour être formelles et limitées, au sens de l’article L. 113-1 du Code des assurances, se référer à des faits, circonstances ou obligations définis avec précision, de telle manière que l’assuré puisse connaitre l’étendue de sa garantie. 

En l’espèce, l’assuré qui avait souscrit un contrat garantissant le versement d’un capital en cas de décès, est décédé lors d’une plongée sous-marine. Ses ayants droit ont assigné l’assureur qui refusait sa garantie, au motif qu’une clause de la police souscrite par le défunt excluait la couverture des sinistres résultant de la pratique, non encadrée par une fédération ou un club sportif agréé, de sports à risques, telle la plongée avec équipement autonome.

La cour d’appel a relevé que la clause opposée par l’assureur excluait de la garantie « la pratique régulière ou non régulière et non encadrée par une fédération ou un club sportif agréé des sports à risques suivants : [...] plongée avec équipement autonome » et a retenu que la mise en jeu de l’exclusion supposait de déterminer si l’activité à risque en cause était ou non encadrée et que l’assuré avait parfaitement compris l’exacte signification du terme « encadrement ». Ainsi, la cour d’appel a considéré que la clause était bien formelle et limitée (et donc applicable), ce qui est approuvé par la Cour de cassation. 

2.1.4 Exclusion de garantie – pertes d’exploitation liées au Covid-19

Cass. civ. 2ème, 1er décembre 2022 (pourvois n°21-15.392, 21-19.341, 21-19.342 et 21-19.343) 
En l’espèce, plusieurs restaurateurs avaient souscrit auprès d’un même assureur des contrats d’assurance « multirisque professionnelle » incluant une garantie « protection financière » ou « perte d’exploitation suite à fermeture administrative ». Ces restaurateurs ont été contraints par arrêtés et décrets et pendant plusieurs périodes de ne plus accueillir de public du fait de la propagation du Covid-19. 

Ils ont alors déclaré le sinistre auprès de leur assureur afin d’être indemnisés de leurs pertes d’exploitation. L’assureur a refusé sa garantie en invoquant une clause qui excluait « […] les pertes d’exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire, départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».

Par quatre arrêts rendus le 1er décembre 2022, la Cour de cassation valide la clause d’exclusion de garantie susvisée en considérant que celle-ci est formelle et limitée. 

Cour d’appel de Paris, 21 juin 2022 (n°20/10832) 
Pour la cour d’appel de Paris, la clause par laquelle l’assureur exclue toute garantie dans le cas où « la fourniture d’une telle garantie, le paiement d’un tel sinistre ou la fourniture d’un tel concours exposerait l’assureur à une quelconque sanction, prohibition ou restriction en vertu des résolutions de l’ONU, des lois et des règlements édictés par l’UE, ou tout autre Etat imposant des sanctions économiques ou commerciales » est une clause d’exclusion au sens des dispositions de l’article L.113-1 du Code des assurances. Par conséquent, la Cour considère que la clause susvisée n’est pas formelle et limitée et qu’elle est donc inopposable à l’assuré, en ce qu’elle ne lui permet pas de connaître avec précision l’étendue de la circonstance qui est exclue.

2.1.5 Déchéance de garantie

Cass. civ. 2ème, 15 décembre 2022 (pourvoi n°20-22.836) 
La Cour de cassation considère que la déchéance de garantie en cas de fausse déclaration relative aux conséquences du sinistre ne constitue pas une sanction disproportionnée, dès lors que l’assureur établit la mauvaise foi de l’assuré. La Cour rappelle également que les parties peuvent librement stipuler les clauses de déchéance de garantie en caractères très apparents dans un contrat d’assurance. 
Cass. civ. 2ème, 1er décembre 2022 (pourvoi n°21-19.343) 

La déchéance de garantie est une sanction conventionnelle, qui peut être librement stipulée par les parties. Elle n’en demeure pas moins soumise à conditions : il convient notamment de démontrer que l’assuré avait eu connaissance de la clause de déchéance et l’avait acceptée.

En l’espèce, la Cour considère que l’assureur ne démontrait pas, en l’absence de production des conditions générales du contrat signées par l’assuré ou d’un renvoi à celles-ci dans les conditions particulières, que ce dernier avait eu connaissance, avant le sinistre, de la clause de déchéance de garantie invoquée et l’avait acceptée. 

2.2 Déclaration du risque

Cass. civ. 2ème, 31 août 2022 (pourvoi n°20-22.317) 
La Cour de cassation retient que l’assureur, qui propose une garantie des risques d’invalidité ou de décès, ne peut poser aucune question relative aux tests génétiques et à leurs résultats. Par conséquent, la Cour considère que la personne ayant procédé à de tels tests n’est pas tenue d’en faire mention dans ses réponses au questionnaire de santé qui lui est soumis au stade de la déclaration du risque.

2.3 Recevabilité de l’action directe contre l’assureur  

Cass. civ. 3ème, 11 mai 2022 (pourvoi n°21-12.478) 
L'irrecevabilité des demandes formées par le tiers lésé à l'encontre de l'assuré responsable est sans incidence sur la recevabilité de son action directe contre l'assureur responsabilité civile de celui-ci.

2.4 Point de départ du délai de la prescription biennale

Cass. crim. 21 juin 2022 (pourvoi n°20-84.428) 
Dans le cadre d’une action de l’assuré ayant pour cause le recours d’un tiers, qui s’exerce par la mise en œuvre de l’action civile devant la juridiction pénale, la Cour de cassation retient que le point de départ du délai de la prescription biennale se situe au jour de la constitution de partie civile de ce tiers devant la juridiction pénale, dès lors que cette constitution manifeste l’intention d’engager la responsabilité civile de l’auteur du dommage, quand bien même la partie civile ne formulerait à ce stade aucune demande en paiement.

2.5 Assurance automobile

Cass. civ. 2ème, 25 mai 2022 (pourvoi n°21-10.439) 
L’assureur garantissant la responsabilité du conducteur d’un véhicule impliqué dans un accident doit présenter à la victime une offre avec tous les éléments indemnisables. Si l’offre n’a pas été faite dans les délais, le montant de l’indemnité produit des intérêts de plein droit. Par ailleurs, l’offre de l’assureur ne peut porter que sur des éléments dont il avait connaissance.

Cass. civ. 2ème, 25 mai 2022 (pourvoi n°20-21.387) 
Si la victime invoque l’insuffisance de l’offre, c’est à l’assureur de produire l’offre et de prouver qu’elle est suffisante et qu’elle porte sur tous les éléments indemnisables du préjudice.

En l’espèce, l’assuré ayant été victime d’un accident de la circulation mettant en cause deux véhicules assurés, a demandé, à l’occasion d’une instance en indemnisation, le doublement des intérêts au taux légal sur le montant de l’offre faite par l’assureur qu’il jugeait manifestement insuffisante. La cour d’appel a rejeté sa demande de doublement du taux de l’intérêt légal, au motif que l’assuré ne produit pas l’offre dont il doit prouver le caractère insuffisant. 

La Cour de cassation a censuré ce raisonnement en rappelant l’article 1353 du Code civil « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ». La Cour de cassation indique que conformément aux articles L.211-9 et L.211-13 du Code des assurances, à défaut pour l’assureur de présenter à la victime dans le délai qui lui est imparti une offre comprenant tous les éléments indemnisables de son préjudice, le montant de l’indemnité offerte par lui ou allouée par le juge, produit intérêt au double de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif.

2.6 Dommages garantis au titre d’une police d’assurance « Responsabilité civile Produits » 

Cass. civ. 2ème, 7 juillet 2022 (pourvoi n°20-18.070) 
La Cour considère qu'il résulte de la définition contractuelle des risques couverts au titre de la « responsabilité civile produits » ainsi que de la clause excluant les dommages ou défauts des produits fournis par l'assuré, que ne sont pas couverts les dommages matériels subis par le produit livré par l'assuré. 

Par conséquent, la destruction d'un ou plusieurs lots de lait contaminés par la salmonelle ou suspectés de l'être, livrés par l'assuré, ne constitue pas un dommage matériel susceptible d'être garanti dans le cadre du contrat « responsabilité civile produits » qui ne couvre que les dommages causés par le produit livré et non les dommages subis ou affectant ce produit.

2.7 Intermédiaires d’assurance

2.7.1 Précision de la notion « d’intermédiaire d’assurance » par la CJUE

CJUE, 29 septembre 2022, aff. C-633/20 
Relève de la notion « d’intermédiaire d’assurance » une personne morale dont l’activité consiste à souscrire un contrat d’assurance de groupe auprès d’un assureur, puis de proposer à des particuliers d’adhérer à ce contrat d’assurance. 

2.7.2  Obligations et responsabilité des intermédiaires

Cass. civ. 2ème, 25 mai 2022 (pourvoi n°19-22.149) 
La Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel qui relève, d'une part, que le courtier avait pris le temps d'effectuer une étude personnalisée avec l'assuré, d'autre part, que le questionnaire de santé précise, près de l'endroit réservé à la signature de l'assuré, que celui-ci reconnaît être informé que toute réticence ou fausse déclaration entraînera la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle. 

Dans ces conditions, la Cour de cassation considère que la responsabilité du courtier ne peut pas être engagée pour ne pas avoir rappelé à l’assuré l’obligation de répondre avec loyauté et sincérité aux questions posées par l’assureur à l’occasion de l’adhésion à une assurance. La Cour rappelle que cette obligation relève de l’obligation de bonne foi qui s’impose en matière contractuelle. 

Cass. civ. 2ème, 15 septembre 2022 (pourvoi n°21-15.528) 
La Cour de cassation considère que le courtier qui a induit en erreur les assurés sur les risques couverts en n’attirant pas spécialement leur attention sur la nécessité de souscrire une assurance facultative complémentaire manque à son obligation de conseil. 

En l’espèce, les organisateurs de manifestations automobiles ont souscrit, par l’intermédiaire d’un courtier, un contrat d’assurance afin de couvrir les risques liés à ces événements. Lors d’un spectacle, des bénévoles sont victimes d’électrocution. Condamnés à réparer les préjudices causés à ceux-ci, les organisateurs découvrent ne pas être garantis à ce titre par leur assureur, lequel n’est tenu de couvrir que les risques automobiles, conformément au contrat souscrit, et non ceux liés aux installations.

La Cour de cassation relève que le courtier a admis avoir estimé que les risques objets de la demande de souscription ne se limitaient pas aux risques automobiles. Par conséquent, elle considère que le manquement du courtier à son devoir de conseil est établi par le fait que le courtier n’a pas spécialement attiré l’attention des organisateurs sur la nécessité de souscrire une assurance facultative complémentaire.

Cass. civ. 2ème, 15 septembre 2022 (pourvoi n°21-13.670)
La Cour de cassation retient que l'intermédiaire qui omet de conseiller à son assuré une garantie plus adaptée à ses besoins lui cause nécessairement un dommage.

En l’espèce, la banque qui propose à son client auquel elle consent un prêt, d’adhérer au contrat d’assurance de groupe qu’elle a souscrit à l’effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l’exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenue de l’éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur.

Le préjudice résultant de ce manquement s’analyse en la perte d’une chance de contracter une assurance adaptée à sa situation personnelle et toute perte de chance ouvre droit à réparation, sans que l’emprunteur ait à démontrer que, mieux informé et conseillé par la banque, il aurait souscrit de manière certaine une assurance garantissant le risque réalisé.

Cass. com. 2 février 2022 (pourvoi n°19-18.704)
Le courtier d’assurance est tenu à l’égard de son client d'une obligation d'assistance dans la gestion des sinistres dont la preuve du respect lui incombe. 

En l’espèce la cour d’appel avait écarté la responsabilité du courtier au motif qu’il n’était pas établi que le courtier devait assister son client dans la gestion du sinistre litigieux car cette mission incombait à l'assureur. La Cour de cassation a censuré l’arrêt de la cour d’appel en considérant que l’assistance au client dans la gestion du sinistre relève du devoir de conseil dont le courtier est redevable et dont il doit prouver l’exécution. 

 

Fin

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